Il était une fois une maison de famille, théâtre de la vie d’une très grande écrivaine française tant par la qualité de ses écrits que par le nombre d’œuvres réalisées. Pourtant, à en croire les programmes de sixième et de troisième en Français, George Sand ne fait pas encore partie des écrivaines incontournables à enseigner. Par sa vie résolument moderne, cette femme impressionnerait-elle encore tous ces ministres de l’éducation nationale en grande majorité masculins ?
J’ai profité de l’invitation d’une amie dans sa maison de famille dans le Berry pour aller visiter le lieu de vie de cette écrivaine, George Sand à Nohant. Je vous avoue, pourtant grande lectrice, que je n’avais jamais lu de livres de cette écrivaine. Je savais que derrière ce pseudonyme masculin se cachait une femme, mais cela s’arrêtait à peu près là ! J’ai alors adoré découvrir sa vie, ses idées, ses avancées, sa quête d’indépendance dans une époque où l’émancipation des femmes n’était alors qu’à ses balbutiements.
Pour une lecture facilitée
George Sand, une personnalité affirmée
La visite de sa maison, contée par une guide qui nous a transportés dans l’univers d’Aurore Dupin, alias George Sand, m’a donné envie d’en savoir plus. Dans la biographie que j’ai choisie, j’ai franchement été étonnée, dans le résumé daté de sa vie, d’y voir énumérer tous ses amants. Je n’ai pas l’impression qu’il en soit de même pour Victor Hugo ou encore Emile Zola. Est-ce pour démontrer l’extraordinaire liberté de cette femme ? Néanmoins, ce n’est franchement pas tout à fait la première impression que cela donne si vous voyez ce que je veux dire. Bref je m’égare …
Une naissance peu commune
Déjà, par sa naissance, en 1804, Aurore Dupin se distingue. Elle est le fruit d’un amour interdit entre Maurice Dupin, capitaine de l’armée napoléonienne, et Sophie-Victoire Delaborde, femme du petit peuple parisien.
Sa grand-mère paternelle, Marie Aurore Dupin de Francueil est issue de la haute aristocratie, fille naturelle du maréchal de Saxe (propriétaire du château de Chambord grâce à Louis XV). Elle-même a dû se battre pour faire reconnaître sa filiation au moment de son mariage.
En 1808, à 4 ans, lors d’une visite de la petite famille à Nohant, propriété de sa grand-mère. Elle perd son petit frère de 3 mois et son père dans un accident de cheval. Sa mère, sans moyen, accepte de confier sa fille à sa belle-mère contre une pension. Ainsi, la maison de Nohant, malgré de premiers souvenirs malheureux, sera et restera sa maison jusqu’à sa mort. Les liens avec sa mère ne seront néanmoins pas coupés.
Cette double ascendance, populaire et aristocratique marquera toute l’œuvre de George Sand.
Les prémices de son indépendance
A la mort de sa grand-mère, elle hérite du domaine de Nohant comptant 250h. Selon les mœurs de l’époque, la jeune fille de 17 ans se marie avec un homme bien plus âgé à qui est confié le domaine. Solange et Maurice naitront de cette union malheureuse et sans amour. Au bout de 10 ans, Aurore Dupin-Dudevant demande le divorce et récupère sa maison.
Sa renaissance en tant que George Sand
Elle a toujours été attirée par les arts. Désormais libre, elle écrit des papiers pour le journal Le Figaro en collaboration avec Jean Sandeau. Ils signent leurs papiers J Sand, qui se transformera en George Sand, une fois seule dans l’écriture,en 1832 : George, prénom berrichon qui lui est cher et sans S, pour se démarquer sans en avoir l’air.
Ses histoires, ses parties pris quant à la condition féminine de l’époque, la profusion de ses écrits et son mystère derrière ce pseudonyme créront un véritable engouement pour cet auteur méconnu. Le succès de ses livres lui assurera son indépendance financièrement tout en préservant durablement le domaine qu’elle aime tant.
La maison et le jardin de George Sand à Nohant
Construite à la fin du XVIIIe siècle, cette maison de maître et ses dépendances sont acquises par Madame Dupin de Francueil, grand-mère paternelle de George Sand.
Ce bâtiment de style classique fût construit en 1775 en lieu et place d’un ancien château fort, qui comprenait rempart et douves et dont seulement deux tours subsistent encore aujourd’hui, intégrées dans la ferme attenante.
Une Maison d’artistes
George Sand partage sa vie entre Paris et Nohant. Cependant, c’est bien dans le Berry qu’auront lieux des rencontres et des séjours propices à la création de grandes œuvres. La vie mondaine à Nohant est très riche. De grand noms de l’époque se côtoient, comme Frédéric Chopin, alors compagnon de George Sand et qui composa à Nohant, la majeure partie de son œuvre musicale. On peut également compter, parmi les invités estivaux, Eugène Delacroix ou encore Gustave Flaubert,etc., …
Pour nourrir tout ce beau monde, George Sand confiait à ses domestiques une grande cuisine moderne avec un fourneau dernier cri venant remplacer l’ancien potager. Ses origines populaires par sa mère ne sont certainement pas étrangères à cette attention.
Cette maison a été habitée jusqu’en dans les années 60 jusqu’à par sa dernière petite fille Aurore Sand, du côté de son fils, qui mourut sans descendance. Elle décida de léguer cette maison avec tout son mobilier à l’Etat pour faire perdurer l’âme de sa grand-mère.
Un jardin remarquable : hymne à la nature
«[…] je sème, je plante, je fume mes plates-bandes, je fais des massifs, j’enfonce des pieux, je relève des murs, je fais venir de la terre légère d’une demie-lieue. Je suis en sabots toute la journée et ne rentre que pour dîner […]».
Le parc de 6 hectares entourant la maison se voulait être un endroit de paix, un hymne à la nature qu’elle appréciait tant. Elle était pour elle, au même titre que sa campagne berrichonne et sa Vallée noire, une source d’inspiration inépuisable. Propriété de l’état depuis 1961, ce jardin a été réhabilité pour retrouver son atmosphère de l’enfance de George Sand tout en évoluant selon les volontés de l’écrivaine.
Les jardins d’agrément
C’est un mélange entre deux styles :
-le 18ème siècle : le romantisme des jardins à l’anglaise
-le 19ème siècle : le jardin naturaliste qui met en scène des plantes vivaces robustes, et graphiques. Elles assurent un spectacle durable.
De la maison, elle aimait regarder, au loin, sa campagne berrichonne. Point de vue qu’il nous est difficile d’apercevoir maintenant que les arbres ont pris de l’ampleur.
On peut y découvrir des arbres remarquables, comme ces deux cèdres du Liban plantés à l’occasion de la naissance de ses enfants ou encore ce Sophora Japonica qui marque l’entrée de la roseraie.
En continuant notre chemin, on s’enfonce dans le parc boisé qui nous emmène jusqu’à l’étang d’un côté et le jardin de cèdres de l’autre.
Le jardin nourricier
Le potager et le verger de pommiers grand vent sont séparés par une allée fleurie bucolique et odorante. Aurore Dupin adorait confectionner de nombreuses confitures avec ses cuisinières.
Voir au-delà du potager actuel nous laisse deviner la superficie du temps de la romancière. En effet, on peut remarquer les nombreuses installations telles que la serre, le cabanon et le pressoir. Tous ses éléments étaient indispensables pour subvenir aux besoins de toute une maisonnée et de ses invités.
La dernière maison
George Sand et sa famille reposent dans le cimetière attenant au cimetière municipal et fait partie intégrante du jardin. Elle repose entourée des siens, au milieu de cette demeure qu’elle aimait tant.
Ce jardin véritable extension de cette maison mérite toute notre attention tant nous avons l’impression de découvrir des univers différents à chaque coin d’arbres ou arbustes.
Pour finir …
Ce domaine semble resté figé à l’époque de l’écrivaine. Le covid ne nous a permis de découvrir le petit théâtre installé dans la maison. Il a été construit pour la mise en scène de ses textes par son fils Maurice. Néanmoins, nous pouvons découvrir toute la collection des marionnettes alors utilisées.
Suite à cette visite, j’ai lu mon premier roman de George Sand : Indiana, et j’ai très envie d’en découvrir d’autres.
Pour en savoir plus …
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